Mettre en évidence les liens entre la santé parodontale et la santé péri-implantaire
Publié initialement dans Implants 4/2018
Le congrès EuroPerio9, qui s’est déroulé à Amsterdam du 20 au 23 juin 2018, a rassemblé plus de 10 000 personnes, un record de participation à ce jour. Les causes et le traitement de la parodontite et de la péri-implantite ont suscité un vif intérêt. Deux nouvelles classifications ont apporté des réponses sur le plan étiologique.
Des présentations scientifiques et axées sur la pratique ont servi à démontrer comment prévenir et, si nécessaire, traiter ces maladies inflammatoires.
Trois patients suisses sur quatre déclarent que la prévention est le principal motif qui les amène à consulter leur dentiste.[1] Cette démarche leur donne l’assurance que leurs dents restent saines. Leur objectif est de conserver le plus longtemps possible leurs restaurations antérieures ou leurs implants. Mais tous les patients ne sont pas conscients du fait qu’une autre condition de la bonne santé dentaire est d'avoir un tissu parodontal ou péri-implantaire intact.
À l’EuroPerio9, des experts de renom ont présenté deux nouvelles classifications servant de base à toutes les mesures préventives et thérapeutiques. Elles ont été élaborées lors d’un atelier animé par l’American Academy of Periodontology (AAP) et la European Federation of Periodontology (EFP) en novembre 2017. D'après la classification, il n’existe qu’une seule forme de parodontite, pour laquelle le traitement est classé en quatre stades, selon sa sévérité et sa complexité.[2] Comme cela a été expliqué en détail à Amsterdam, les résultats des recherches actuelles indiquent qu’on ne peut pas distinguer une parodontite autrefois qualifiée d’agressive d’une parodontite chronique sur la base de critères microbiologiques ou immunologiques. D’après le nouveau système diagnostique, la maladie est classifiée en parodontite chronique, ce qui signifie que le patient devra recevoir un traitement de suivi à vie.
Un traitement parodontal essentiellement inchangé
Tous les examens dentaires reposent sur l’étude des antécédents médicaux détaillés, associée à un diagnostic ciblé contenant le plus de détails possible. Le chirurgien-dentiste enregistre les facteurs de risque systémiques tels que le diabète ou le tabagisme et identifie toute augmentation de la tendance potentielle à l'inflammation.[3] Les tissus durs et mous sont examinés et les poches parodontales sont sondées dans le cadre d’un test de dépistage selon le PSR (Periodontal Screening and Recording). En cas de résultats anormaux, l’état du parodonte est ensuite enregistré et un traitement est démarré si nécessaire. Ce traitement débute par la gestion professionnelle du biofilm à l'aide par exemple de cupules rotatives et de composés de polissage (Fig. 1) et comporte des instructions complètes sur l’hygiène buccodentaire. Les systèmes à ultrasons restent une alternative ou un complément efficace aux instruments manuels pour le détartrage subgingival et la gestion du biofilm (présentation du Pr Dr Ulrich Schlagenhauf ;
Fig. 2). Le recours en complément à la thérapie photodynamique, à l’aéropolissage ou aux antibiotiques locaux et systémiques n’est pas suffisamment documenté (Pr Dr Sema Hakki).[4] D’après le Dr Sergio Bizzarro, un diagnostic amélioré des biomarqueurs peut conduire à une utilisation plus fréquente des thérapies personnalisées à l’avenir.
Prévention primaire des inflammations
Le principal critère de la première classification des inflammations péri-implantaires est que la parodontite, la mucite et la péri-implantite sont dues au biofilm.[5] Il faut toutefois admettre que le traitement ne donne pas toujours de bons résultats.[6] Pour empêcher l’apparition de ces maladies inflammatoires, les solutions sont une bonne hygiène buccodentaire et une gestion professionnelle du biofilm.[7-9] Une étude randomisée fondée sur la pratique a révélé que, pour conserver une zone péri-implantaire saine, la plupart des patients se rendent à des visites de suivi deux à quatre fois par an, indépendamment des moyens de traitement mécaniques utilisés.[10] Le risque d’inflammation péri-implantaire est considérablement plus élevé chez les patients souffrant d'une parodontite.[11] Le constat est le même chez les patients qui ont reçu un traitement initial mais n’ont pas intégré de programme de suivi (UPT).[12] Une bonne gestion du biofilm et un traitement parodontal initial sont des conditions préalables particulièrement importantes quand on planifie une implantation.
Une implantation faite dans les règles
L’implantation et la restauration d’un implant sont effectuées en suivant des protocoles chirurgicaux et prothétiques standard. Des moteurs d’implantologie à haute performance associés à des contre-angles chirurgicaux permettent l'insertion de l'implant. Il faut faire circuler de gros volumes de liquides de refroidissement à faible vitesse pour empêcher la surchauffe de l’os.[13] Lorsqu’un implant vissé se trouve dans sa position finale, il est possible de déterminer sa stabilité définitive de façon fiable et précise à l'aide de l'analyse de fréquence de résonance (RFA). Un protocole de mise en charge axé sur la valeur ISQ empêche l’implant de développer des micro-mouvements, ce qui améliore le pronostic.[14] Comme l'indique le document de consensus présenté à l’EuroPerio, le rôle potentiel des facteurs biologiques et biomécaniques susmentionnés dans le développement des péri-implantites reste encore à préciser.[5]
D'abord un examen, puis un traitement
Lorsqu’il est sain, le tissu péri-implantaire ne montre aucun signe de rougeur, de gonflement ou de saignement et l’examen ne révèle aucune formation de pus.[5] À partir du document de consensus, le Pr Giovanni Salvi a justifié l’importance d’un examen régulier — de préférence à l'aide d’une sonde flexible, car les éléments de l'implant ont tendance à gêner l'accès au site d’intervention.[5] Dans le cas d’une mucite ou d’une péri-implantite initiale déjà présentes, il convient dans un premier temps de tenter d’éliminer par une méthode non chirurgicale les dépôts durs et le biofilm. Pour ce faire, on utilise des instruments à ultrasons et spéciaux conçus pour protéger l'implant (Fig. 3 ; détartreur piézo Tigon+ avec 1I, W&H). En l'absence de rémission, la fréquence de suivi doit être augmentée. Toutefois, aucune recommandation spécifique, applicable au cas par cas, n’a encore été donnée dans ce contexte.[15]
Selon une étude non publiée présentée par le Dr Salvi, le recours à une thérapie photodynamique ou à une antibiothérapie locale ne réduit pas significativement les saignements lors de l’examen chez les patients souffrant d’une mucite ou d'une péri-implantite initiale. Ce constat est similaire aux observations relatives à la parodontite et, d'après un examen systémique, s’applique également à l’aéropolissage subgingival. Le Pr Stefan Renvert déclare que la capacité ou non d’un implant à rester en place en présence d'une péri-implantite dépend de la possibilité de retenir la prothèse implanto-portée. Parmi les autres facteurs on peut citer l’état de santé général du patient ainsi que ses moyens financiers. Une thérapie régénérative peut être indiquée en cas de défauts osseux à 3 ou 4 parois. Par ailleurs, un implant peut être retiré de manière relativement atraumatique en utilisant des instruments piézochirurgicaux.
Pas d’implantologie sans parodontologie – (No Implantology without Periodontology – NIWOP)
Lors d’un symposium organisé par l’entreprise d’instrumentation dentaire autrichienne W&H, le chirurgien oral et parodontologue Dr Karl-Ludwig Ackermann a expliqué qu’il ne posait pas d’implants chez un patient présentant une pathologie sans lui avoir au préalable prescrit un traitement parodontal. Ces principes reposent sur plusieurs années d’expérience ainsi que sur une stratégie clinique qui est basée sur la méthode de travail dite NIWOP qui signifie « No Implantology without Periodontology ». Cette méthode de travail, élaborée à partir du 11ème workshop de l’EFP, a été clairement confirmée à l’EuroPerio9. Le Pr Anton Sculean, Président de l’EFP, qui a présidé le congrès, a déclaré : « Avec le grand nombre d'implants posés actuellement, la parodontite est devenue un problème majeur. W&H en a pris conscience et a choisi la bonne stratégie en suivant le principe NIWOP. »
Bibliographie
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